La Côte d’Ivoire peut-elle encore sauver sa forêt ? Les élus locaux à la rescousse

De 1961 à aujourd’hui, trente-deux (32) ministres ivoiriens des Eaux et Forêts se sont succédé dans différents gouvernements. Malgré cette longue succession de gardiens de la végétation, l’espace forestier de la Côte d’Ivoire diminue sans interruption. Une situation qui risque, si rien n’est fait, d’impacter négativement l’avenir des générations futures.

Norme pour être un pays forestier

Pour qu’un pays soit reconnu comme forestier, il faut que 20% au moins de son territoire soit recouvert de forêt. Juste après l’indépendance de la Côte d’Ivoire, son premier président, feu Félix Houphouët-Boigny, avait fait sien ce combat. En effet, dans la délimitation des espaces, les forêts classées, parcs et réserves, représentaient, à eux seuls, 20% du couvert forestier. Sans que ne soient ajoutées les forêts dites villageoises, qui n’étaient pas négligeables. Malgré ces efforts pour conserver la forêt, l’action humaine a anéanti le travail abattu en amont. 

Facteurs d’une perte incommensurable

De 16,5 millions d’hectares à l’indépendance en 1960, le couvert forestier ivoirien est passé à moins de 2 millions d’ha en 2022. Soit près de 90% de ses forêts perdues en 62 ans. La situation est catastrophique et appelle des mesures correctives. Faute de celles-ci, il est fort probable que le couvert forestier disparaisse vers 2040. 

La forte dégradation de la forêt est due aux actions multiples de l’homme, notamment ses pratiques extensives de l’agriculture, la coupe de bois, des écorces et des feuilles pour des besoins médicamenteux, alimentaires, d’ébénisterie et autres. 

Aussi, à la recherche d’un mieux-être, de nombreuses personnes se sont investies dans les cultures de rente, dont l’anacarde, le cacao, le café, l’hévéa, le palmier à huile, etc. Or, les plantations affrétées pour ce genre d’exercice occupent d’énormes espaces, réduisant du coup le couvert forestier. A cela s’ajoute la croissance fulgurante des villes, qui occasionne le défrichement d’espaces pour la construction d’infrastructures immobilières et d’éléments vitaux pour elles. Le problème crucial de cette situation est que dans l’entendement collectif des agriculteurs, les cultures de rente ou pérennes ne sont praticables que dans les forêts. Malgré toutes les alertes données par des scientifiques, des experts en environnement, des organisations non gouvernementales (Ong) et des institutions, les gouvernants ivoiriens ont du mal à rectifier le tir.

Ce qui est paradoxal, c’est que les décideurs qui en appellent, à chaque fois, les populations à s’abstenir de détruire la forêt, ne songent pas à prendre des mesures drastiques pour faire respecter leurs décisions. Résultat, le couvert forestier diminue de la seconde à la tierce, sous les regards impuissants de tout le monde.

La partition des élus locaux réclamée

La Côte d’Ivoire peut encore sauver sa forêt, si chacun y met du sien. En effet, de nombreuses actions individuelles et collectives peuvent être menées pour reverdir l’espace forestier ivoirien. 

A ce propos, l’Etat joue sa partition depuis de nombreuses années. Depuis 2007, la recrudescence des agressions des forêts classées, ainsi que leur infiltration ont amené les gouvernements successifs, par le truchement de la Société de développement des forêts (Sodefor), à mettre en place une stratégie de gestion durable et efficiente. 

De sorte à maintenir et à développer le couvert forestier dans ces massifs classés, sans pour autant détruire les plantations de cacao des planteurs intrus dans les forêts non autorisées à accueillir des activités agricoles.  

Bien que cette structure étatique soit sur le pied de guerre, de concert avec les ministères en charge du dossier reforestation, il n’en demeure pas moins que les élus locaux jouent également leur partition. C’est un devoir de conscience, donc l’affaire de tous. 

Les collectivités locales (mairies, Conseils régionaux et Districts autonomes), doivent être mises à contribution pour réussir la reforestation. Erosion des côtes, destruction des mangroves, pluies diluviennes hors saison, abattage déraisonné d’arbres pour la fabrication du charbon de bois, sécheresse dans certaines localités, etc., sont la preuve qu’une gestion rationnelle de la forêt doit être prise en compte dans le développement de la Côte d’Ivoire.

Mais si rien n’est fait, ce sont les générations futures qui en payeront le prix fort.

Les solutions de la Côte d’Ivoire pour s’en sortir

Pour juguler le mal qui ronge la forêt ivoirienne, des actions sont entreprises depuis de nombreuses années. Malheureusement, elles n’ont pu donner l’espoir escompté. Qu’elles soient d’envergure ou de petitesse, leur résilience peut apporter une solution définitive. 

Pour la reforestation de son territoire, la Côte d’Ivoire, à travers le gouvernement, a décidé de prendre le taureau par les cornes. Ainsi, un plan Marshall dénommé « Stratégie nationale de préservation, de réhabilitation et d’extension des forêts », est en action. 

Cette politique adoptée le 23 mai 2018 se distingue des initiatives antérieures, par le fait qu’auparavant seul l’Etat était impliqué dans ce sujet. L’actuelle politique met en avant les efforts que devront fournir les acteurs, notamment l’Etat, le privé, la société civile, les partenaires techniques et financiers.

La stratégie arrêtée pour résoudre cet épineux problème réside à comment mettre en œuvre la politique nationale ? Les réponses sont à géométrie variable. 

Cependant, ce qui urge,  c’est la réponse réaliste pour parvenir à l’exécution de ce projet. Dans son contenu, la stratégie comprend l’amélioration de la gouvernance forestière, le renforcement de la protection des massifs forestiers résiduels, leur extension et leur gestion durable, la reconstitution des zones forestières dégradées et l’adaptation aux changements climatiques. 

D’autres aspects sont aussi indispensables pour appuyer les efforts susmentionnés. Il s’agit de renforcer la loi sur la destruction de la forêt et d’augmenter les moyens financiers alloués à la Sodefor. Il faudra, en outre, imposer une politique environnementale au système scolaire et aux collectivités. Il faudra, par ailleurs, revoir le permis d’exploitant forestier et de fabricant de charbon de bois. Des métiers qui, sans qu’on ne s’en rende compte, sont les plus grands fossoyeurs de la forêt ivoirienne.

Clément Koffi

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