DIMBOKRO : A quand le retour de la gloire ?

Parmi les villes ivoiriennes qui souffrent du manque d’infrastructures économiques significatives, figure la vieille ville de Dimbokro, chef-lieu du District des Lacs, dans la région du N’zi. Zoom sur une localité chargée d’histoire et qui demande à renaître.  

Dans l’histoire de la Côte d’Ivoire, Dimbokro est l’une des villes qui a farouchement résisté au colonisateur. Elle a été par excellence et pendant un long moment, l’un des pôles du commerce grâce à sa gare ferroviaire et au cacao. La notoriété qu’elle a acquise lui a permis d’accueillir la fête de l’indépendance tournante du pays. Grâce à celle-ci, des infrastructures modernes ont vu le jour, notamment le réceptif hôtelier de la Société ivoirienne d’expansion du tourisme et de l’hôtellerie (Sietho), devenu ‘’La Renaissance’’ en 1975. Malheureusement, cette époque glorieuse semble avoir foutu le camp au fil des années. Entraînant, dans son sillage, l’abandon aux broussailles de cette infrastructure touristique, auparavant lieu privilégié des touristes. Entre-temps, le marasme économique est venu assommer le peu de richesses qui permettait à de nombreuses personnes de subsister. 

L’hôtel ‘’La renaissance’’, une ouverture  incertaine

Lors d’une réunion des filles et fils de Dimbokro à l’Hôtel du District autonome d’Abidjan en 2016, pour préparer la visite du président de la République dans leur ville, le maire Gabriel Amon Diéméléou Bilé, avait annoncé que ce complexe hôtelier (Ex-Sietho), était la propriété de Dimbokro. Et que la cessation d’activités l’ayant conduit à la fermeture, des études ont été confiées au Bureau national d’études techniques et de développement (Bnetd), en vue de la remettre en activité. 

Le 2 juin 2019, parrain de la 8ème édition du Festival du tourisme de Dimbokro (Festourdim), Siandou Fofana, ministre du Tourisme et des Loisirs, a annoncé la renaissance touristique de la région du N’Zi, dans le cadre de ‘’Sublime Côte d’Ivoire’’, sa politique de faire du tourisme l’un des trois (3) piliers de l’essor économique ivoirien en 2025.

Ce jour-là, il a énuméré cinq (5) projets majeurs qui, selon lui, vont « redonner à Dimbokro ce que cette ville a tant donné à la Côte d’Ivoire, auréolée en cela d’un passé glorieux, en tant qu’ancienne boucle du café-cacao ; et en faire, dorénavant, la boucle du tourisme et un modèle du Vivre-ensemble ».

Au nombre de ces projets, le ministre a cité la réhabilitation de l’hôtel ‘’La Renaissance’’, géré par l’ex-Sietho, de 1974 à 1984. Communément appelé ainsi, ce réceptif hôtelier est aujourd’hui en ruine. Mais «sa reconstruction se fera grâce à un financement dans le cadre du partenariat public/privé », avait indiqué le ministre Siandou. 

Seulement, l’attente semble longue pour les personnes désireuses de travailler, afin d’avoir les moyens de tenir le coup. Hélas, le temps passe et toujours rien en vue. Aucune activité, aucun début de travaux de réhabilitation n’est entrepris, pour manifester une quelconque volonté de réouverture de l’hôtel ‘’La renaissance’’. «Où en est-on avec ce dossier ? », s’interrogent les populations de Dimbokro.

Temps de gloire

En 1908, le chemin de fer de la Régie Abidjan-Niger (Ran) atteint ‘’Kouassi Djéngbôklô’’, un campement créé par Kouassi Djéngbô. Le colonisateur baptise le lieu “Dimbokro”, selon la prononciation que ses oreilles ont entendue. Le campement évolue rapidement et devient un grand pôle d’attraction. D’abord chef-lieu de cercle, il est érigé en préfecture, puis baptisé ‘’La boucle du cacao’’ dans les années 70-80. Et ce, grâce à la forte production de ce produit de rente dans le territoire de sa zone de compétence, notamment Arrah, Bocanda, Bongouanou, Daoukro, M’Batto et Ouellé. L’activité agricole est renforcée par celle de l’usine de l’Union industrielle textile de Côte d’Ivoire (Utexi), en 1973.

Avec ses offres d’emploi, Dimbokro devient un centre commercial et économique d’envergure. Si bien que de nombreuses personnes s’y installent avec le secret espoir de jouir des richesses de ce désormais eldorado. 

Cette renommée lui vaut d’accueillir la fête tournante de l’indépendance en 1975. Les activités de la ville vont bon train. Elles permettent à chaque habitant de tirer bénéfice de ses potentialités. Malheureusement, des événements malencontreux surviennent et plombent le développement de la ville.

Origines de la déchéance

En 1995, une crise économique sévère sévit. Sous la pression des bailleurs de fonds, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire cèdent l’exploitation de la Ran à un consortium privé, la Société internationale de transport africain par rail (Sitarail). La politique du nouveau gestionnaire privilégie les wagons-marchandises à ceux des passagers. Ce qui induit un changement du mode de transport ivoirien. Toutes les agglomérations du pays, même celles desservies par le chemin de fer, s’orientent vers les autobus. Une situation qui met à mal la ville de Dimbokro, traditionnellement tributaire du transport ferroviaire. 

A la suite de ce changement brusque, l’Union industrielle textile de Côte d’Ivoire (Utexi-Ci), le poumon des offres d’emploi de la ville, ferme pour la première fois en 2002. Victime du début de la crise militaro-politique, aboutissant huit ans plus tard à une crise postélectorale. 

Du fait de cette crise, le coton, matière première de l’usine dont le gros des approvisionnements provient des localités du Nord ivoirien, du Burkina Faso et du Mali, n’arrive plus facilement pour faire tourner l’usine. Ouverte sporadiquement, l’usine qui emploie à plein régime 2.000 personnes, et 4ème plus gros employeur du pays, est sous respiration artificielle depuis 2016. 

Malgré une consolation faisant de la ville la plus propre de Côte d’Ivoire en 2017, Dimbokro est l’ombre d’elle-même. Même le jardin public qui faisait la fierté de la ville est devenu un marché à la sauvette. Mettant ainsi fin à l’époque de gloire. 

Aujourd’hui, la ville tourne au ralenti. Provoquant un ras-le-bol des jeunes, qui jettent leur dévolu sur les sites d’orpaillage clandestin. Manque de ressources financières oblige.

Clément Koffi

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